les Piaroa
Les Piaroas Les Piaroas sont un peuple indigène d'agriculteurs du bassin de l'Orénoque oriental. Ils sont environ 12 2001 au Venezuela, principalement dans le département de l'Amazonas dans une région de 45 000 km22 à peu près circonscrite par le río Parguaza (nord), río Ventuari (sud-est), río Manapiare (nord-est) et la rive droite de l'Orénoque (ouest) et 6002 en Colombie, dans plusieurs réserves dans le sud du département du Vichada, entre le río Vichada au nord et le río Guaviare au sud.
Les Piaroas sont fortement égalitaires, anti-autoritaires, et ils rejettent l'accaparement de biens par quiconque. Ils soutiennent l'autonomie individuelle et leurs décisions sont prises par consensus. Ils ont donc été décrits par certains anthropologues (tels que Clastres ou Overing) comme une société anarchiste qui fonctionne réellement. Les quarante dernières années ont vu des grands changements sociaux et culturels chez les Piaroas, y compris une migration massive vers la périphérie de leur territoire traditionnel pour accéder aux biens et services modernes du Venezuela et de la Colombie. Les centres de soins attirent notamment beaucoup de monde, même si la concentration de la population dans leurs alentours entraîne une raréfaction des ressources naturelles et foncières. Malgré cela, les Piaroas ont conservé l'agriculture comme base de leur économie et sont relativement indépendants du point de vue alimentaire. « Piaroa » n'est pas un nom d'origine autochtone : il vient vraisemblablement de Pearoa, nom donné par les missionnaires jésuites au XVIIe siècle, qui s'est transformé en Piaroa à la fin du XVIIIe siècle. Suivant les personnes à qui ils s'adressent, et la situation, les Piaroas utilisent les termes : Wóthuha est également orthographié Huǫttųją (orthographe du Summer Institute of Linguistics) et Wötʰïhä (en alphabet phonétique international). Histoire connue Les premières références aux Piaroas datent de la seconde moitié du XVIIe siècle avec les contacts entre ce peuple et les missionnaires jésuites établis entre le río Meta et le río Casanare. Les missionnaires décrivent ces indigènes comme se nommant Pearoa. Le nom Piaroa apparaît lors de la période d'expéditions dans la région menées par plusieurs explorateurs durant la fin du XVIIIe siècle et au cours du XIXe siècle, notamment Humboldt, Bonpland en 1814-1819 et Chaffanjon en 1889.
L'arrivée de l'Église catholique en 1937 et de l'ONG chrétienne évangélique New Tribes Mission en 1946 apportent beaucoup de changements dans la région. Cette dernière a un impact majeur sur les Piaroas car leurs missionnaires finissent par bien maitriser la langue et apportent des soins médicaux mêlés à une conversion religieuse, ce qui modifie la perception des Occidentaux par les Piaroas. Les convertis attirés à la mission Tamatama sont formés comme disciples puis retournent dans leurs communautés où ils convertissent leurs familles et voisins. L'Église catholique devient un fournisseur de services important dans les années 1960. De nombreux jeunes Piaroas fréquentent l'école de la mission catholique salésienne d'Isla Ratón sur l'Orénoque où ils apprennent l'espagnol et les coutumes occidentales. À cette époque, sûrement en rapport avec ces contacts, des épidémies de maladies d'origine étrangère comme la rougeole, le paludisme et les maladies vénériennes ravagent les Piaroas et en oblige de nombreux à quitter leurs lieux de résidence traditionnelle pour aller recourir à la médecine moderne. Le Dr Hans Baumgartner et d'autres membres du Service de Paludisme leur fournissent des médicaments modernes et étudient l'état de santé de la population. Beaucoup de Piaroas se concentrent donc près des missions religieuses et des centres occidentaux où les soins de santé modernes sont disponibles. L'augmentation de l'investissement public dans les années 1970 dans le sud du Venezuela, alimenté par la richesse pétrolière de la région, contribue à concentrer les Piaroas dans le voisinage des écoles, des établissements de santé et centres économiques tels que Puerto Ayacucho, capitale de l'État de l'Amazonas. Environ 80 % de la population s'est convertie au christianisme et les écoles rurales dirigées par des enseignants autochtones se trouvent dans plus de vingt communautés3. Depuis un peu plus de trente ans, les Piaroas ont cessé de vivre en petites communautés mobiles et reculées pour s'installer dans des centres sédentaires de plus en plus importants, au voisinage de missions ou de villes et villages. Les progrès dans les moyens de transport comme les routes, les moteurs hors-bord et les pistes d'atterrissage influencent beaucoup l'intégration culturelle et économique des Piaroas dont la plupart ont des contacts réguliers avec la société occidentale pour y vendre leur farine de manioc et leurs produits cultivés ou récoltés dans la forêt ainsi que pour acheter des biens occidentaux. Seuls 5 % des Piaroas, surtout ceux dans la partie supérieure du bassin versant Cuao-Parguaza-Cataniapo, restent isolés de la société occidentale et conservent un style de vie traditionnel. Économie traditionnelle La culture économique et matérielle des Piaroas est typique de la région guyanaise et de l'Amazonie. Leurs moyens de subsistance sont basés sur la culture itinérante, la chasse, la pêche et la cueillette de plantes sauvages et de micro-faune. En plus des activités qui visent directement à l'obtention de nourriture, une partie intégrante de leur économie de subsistance est la fabrication de divers objets utilitaires. Ils savent produire un curare de haute qualité qu'ils confectionnent et vendent à d'autres groupes ethniques sous forme d'œuf et qui sert de monnaie d'échange. Ce mode de vie permet aux Piaroas de vivre quasiment en autosuffisance. Cette industrie indigène est fondée sur la connaissance et l'utilisation d'un grand nombre de plantes de l'habitat Piaroa. Les artefacts ne sont pas seulement utilisés dans les travaux d'exploitation, domestiques ou religieux, mais aussi pour échanger avec les autres tribus et groupes ethniques ou obtenir les marchandises fournies par les Piaroas occidentalisés (couteaux, hameçons, vêtements, chaussures, perles, etc.). Culture itinérante Le cycle de culture piaroa est constitué d'une série de phases interdépendantes qui se suivent et parfois se chevauchent. La principale différence se situe entre les phases intensives, connues sous le nom de patha et une série de phases décrites avec le terme générique resaba. Ces dernières commencent quand les cultures exigeantes comme celles du manioc ou du maïs sont remplacées par celles à croissance lente comme les arbres, qui demandent peu d'attention et des périodes de production beaucoup plus longues. On peut voir dans le tableau ci-après que ces deux termes génériques sont divisibles en plusieurs catégories plus petites, qui décrivent les phases de l'évolution du jardin, des espèces dominantes, du propriétaire, etc.
Les jardins de l'Alto Cuao où Zent à effectué ses recherches, et qui représentent bien l'agriculture traditionnelle des Piaroas, renferment de 20 à 40 cultigènes et vraisemblablement plus d'une centaine de variétés différentes. Chaque famille exploite annuellement, par brûlis, un demi hectare de forêt primaire et secondaire, pour y cultiver une grande variété de plantes, dont les principales sont le manioc amer, le maïs, la patate douce. Puis la parcelle est abandonnée au bout de quatre ans et s'ensuit une jachère de 15 ans et plus. D'après Serge Bahuchet :
Les cultures vivrières les plus importantes sont le manioc et le maïs, mais sont également plantés des légumes (patate douce10, igname, courge, pois, etc.), des fruits (ananas, banane, papaye, pastèque, avocat, lime, goyave, fruit de la passion, cacao sauvage, noix de cajou, arachide, etc.), des condiments (piment, gingembre, canne à sucre, etc.), des plantes industrielles (coton, calebasse, tiges de flèches, teintures comme le roucou ou la chica), ornements comme la Larme-de-Job, plantes ichtyotoxiques comme le barbasco, cordages, etc., des drogues (tabac, capi, yopo), ou encore des plantes magiques et médicinales (amaranthe, caladium, calathea, etc.). « Un droit d'usufruit est reconnu à qui travaille la terre, sans possibilité de transmission. Le chef de chaque maison collective est responsable du maintien de la fertilité du territoire qui l'entoure, dont les contours sont redéfinis à chaque changement de chef. »
Chasse, pêche et cueillette Traditionnellement les Piaroas n'élèvent pas d'animaux pour la nourriture, à part peut être les poules et poulets, mais ceux-ci sont élevés plus comme animaux de compagnie et ne sont pas consommés. En effet, comme ils mangent sur les piles de détritus et sont donc considérés comme des animaux sales (tandis que les rats qui mangent les récoltes sont considérés comme propres et sont une viande appréciée), cependant leurs œufs sont parfois consommés. La chasse, la pêche et la récolte d'animaux sont donc nécessaires pour compléter l'alimentation des Piaroas en acides gras et en acides aminés. Les chasseurs utilisent la sarbacane avec des fléchettes empoisonnées au curare, la lance, le gourdin, le couteau, les collets ou des pièges englués. Bien que la sarbacane soit l'arme traditionnelle des Piaroas, le fusil, depuis la rencontre avec les Occidentaux, est devenu l'arme principale. Ils sont parfois accompagnés d'un chien de chasse, qui est très apprécié pour la traque des animaux vivant dans les terriers : il détectent aisément si l'animal est dedans ou le poursuivent jusqu'à ce qu'il s'y réfugie, facilitant sa capture et bien que les chasseurs se débrouillent très bien sans chien. À part l'anaconda et le tapir, animaux sacrés et donc tabous, la loutre, l'opposum, tous les félins et les chauves-souris, certains oiseaux (vautours, aigles, grande aigrette) et serpents venimeux qui ne sont pas mangés, tous les animaux sont chassés, grâce à un savoir encyclopédique de leurs haitudes et habitats et aux nombreuses techniques pour les capturer. Les proies des Piaroas sont, toutefois, principalement des pacas, pécaris et cervidés.. Ils chassent aussi les oiseaux, singes, écureuils, martres, tatous, paresseux, porcs-épics, agoutis, tamandous, souris-opossums, kinkajous, olingos, coatis, etc.
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